Epitaphe
A ma mère
Dans cette terre où depuis
Un triste jour de Juin
Tu reposes calme et sereine
Avec pour souvenir cette peine,
Ce mal épouvantable
Qui t’a extirpée à notre amour,
Au pied d’un érable
J’ai déposé tes cendres
Encore brûlantes de nos larmes.
C’était l’été, il faisait chaud
Le soleil brillait en contraste
Nous étions ensevelis dans la douleur.
Tu as été la matrice de ma vie
La fleur de mon enfance.
Tu m’as donné de la douceur
Hélas, quelle peine de ne plus t’avoir
A mes côtés
A réciter
Ces vers incessants
Que tu connaissais par cœur
« Ce siècle avait deux ans… »
Pour toi il en avait sept
Tel Brassens dans un cimetière de Sète
Tu continues de déclamer
Ces poèmes sempiternels
Qui s’accrochent à mon cœur, à mon âme :
« …Mais où sont les neiges d’antan ? »
« Pourquoi le prononcer ce nom de la patrie…
Rome, l’unique objet de mon ressentiment…
Quand je suis vingt ou trente mois
Sans retourner en Vendômois…
Objets inanimés, avez-vous donc une âme ?
O combien de marins, combien de capitaines,…»
Que ne connaissais-tu pas ?
Les auteurs classiques tu les avais tous appris,
Tu t’en servais dans tes derniers jours de lucidité
Pour t’accrocher à la réalité.
Merci , Maman de m’avoir appris
L’art de la beauté de la poésie,
Tel un Brel apeuré
Tu m’as tout donné
De l’art de la lettre
A la littérature
De l’amour de l’enfant
A la patience et à la souffrance silencieuse.
Comme j’aurais aimé d’une main doucereuse
Effacer sur ton front ces rides profondes
Témoins d’un combat acharné contre l’abandon.
J’ai fait ce que j’avais à faire comme tu me l’as demandé
Comme tu me l’as montré sans vraiment l’exprimer.
J’ai connu la beauté, la bonté, l’amour et l’amitié
Et chacun des ces pas me vient de toi
Evoquant le silence, l’amertume, le sourire, la compassion.
Maman, comme je t’aime
Je t’aimerai toujours
Tu seras toujours là dans un coin de mon âme
Pour cicatriser mes blessures et m’aider à assurer mes pas.
Nous avons toutes deux connu des malheurs qui n’appartiennent qu’à nous
Nous avons lutté contre et parfois triomphé
Mais ton plus grand triomphe, Maman que je vénère,
C’est d’être décédée dans la dignité
Comme tu as toujours vécu.
A maman emportée par le cancer le 05 juin 2006